L’assassinat d’Ahmed Suale : Cinq ans de souffrance, d’impunité et de léthargie judiciaire

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Ahmed Hussein Suale
Ahmed Hussein Suale

Le 16 janvier 2019, Ahmed Suale, membre de l’équipe d’enquêteurs Tiger Eye PI qui a révélé la corruption dans le football africain, a été abattu par des inconnus à Accra.

À l’occasion du cinquième anniversaire de la disparition du journaliste, la Fondation des Médias pour l’Afrique de l’Ouest (MFWA) retrace les événements qui ont précédé et suivi cette attaque des plus effroyables contre la liberté de la presse au Ghana :

  1. Mai 2018 – Le député Kennedy Agyapong, membre éminent du New Patriotic Party (NPP) au pouvoir, menace de « dénoncer » le journaliste d’investigation Anas Aremeyaw Anas s’il diffuse le documentaire d’investigation annoncé portant sur la corruption dans le football africain.
  2. 6 juin 2018 – « Number 12 », le documentaire d’investigation est projeté publiquement à Accra.
  3. Le député commence à mettre ses menaces à exécution, en publiant des photos des membres de l’équipe, dont Anas et Suale, qui sont toujours déguisés.
  4. Agyapong intensifie sa campagne de haine contre Ahmed Suale en particulier, appelant ses partisans à attaquer le journaliste.
  5. 16 janvier 2019 – Des hommes armés non identifiés attaquent le véhicule d’Ahmed Suale en pleine circulation et l’abattent.
  6. 21 janvier 2019 – La police annonce avoir interrogé Ken Agyapong et l’ancien président de la Fédération ghanéenne de football, Kwesi Nyantakyi, en lien avec le meurtre.
  7. Le 22 janvier 2019, une semaine après le meurtre, une délégation de haut niveau de la police se rend sur les lieux du crime. Elle présente ses condoléances à la famille d’Ahmed Suale et promet d’appréhender et de traduire en justice les auteurs du crime.
  8. 30 janvier 2019 – Kennedy Agyapong déclare publiquement qu’il ne regrette pas d’avoir fait sauter la couverture d’Ahmed Suale.
  9. 7 février 2019 – La police arrête six suspects pour le meurtre. En mars, tous les suspects sont relâchés faute de preuves.
  10. 18 mars 2019 – Ken Agyappong révèle que sa campagne d’attaques contre l’équipe de Tiger Eye a été instiguée par des membres dirigeants du NPP au pouvoir qui estimaient que le travail d’Anas était dangereux pour le NPP.
  11. Juillet 2019 – La procureure générale du Ghana annonce que la police ne lui a toujours pas remis de dossier sur l’affaire Ahmed Suale.
  12. 9 septembre 2019 – Le président Akufo-Addo déclare que l’assassinat de Suale n’est pas nécessairement lié à son travail de journaliste et qu’il ne s’agit donc pas nécessairement d’une atteinte à la liberté de la presse. La MFWA proteste contre cette déclaration du président, la qualifiant de regrettable.
  13. 24 mai 2021 – Ken Agyapong accuse un certain Ansu Gyeabour d’être l’assassin de Suale. Ansu Gyeabour réfute les allégations de Ken Agyapong.
  14. 13 décembre 2022 – Lors d’un forum commémorant la Journée mondiale des droits de l’homme, le procureur général du Ghana, Godfred Yeboah Dame, insinue que le meurtre de Suale pourrait ne pas être lié à son travail de journaliste. La MFWA répond en publiant un article.
  15. 22 décembre 2022 – Le président Akufo-Addo promet que son gouvernement continuera à traquer les assassins de Suale.
  16. 15 mai 2023 – L’ancien président John Mahama, candidat à l’élection présidentielle pour le National Democratic Congress (NDC), s’engage à poursuivre l’affaire Ahmed Hussein Suale s’il est élu président en 2024.
  17. 16 janvier 2024 – L’impunité, la douleur et la léthargie judiciaire se poursuivent

Chaque minute d’impunité pour l’assassinat d’Ahmed Suale est un gain pour ses assassins et une incitation pour les futurs auteurs d’attaques contre des journalistes, des défenseurs des droits de l’homme ou des lanceurs d’alerte. Nous ne devons pas laisser cette situation perdurer plus longtemps.

La MFWA exhorte tous les acteurs du secteur des médias à rester fermes dans leur demande de mettre fin à l’impunité qui entoure l’assassinat d’Ahmed Suale. Le découragement n’est pas une option.